Chronique

Une vision différente de l’art et de la créativitéSéjour en territoire autochtone

PROJET – Les étudiants-chercheurs Jean-François Vachon, Lise Émond, Claudia Néron et Sarah-Emmanuelle Brassard ont pris part au projet visant à découvrir et à partager des ressources créatives avec des artisans autochtones. Ceux-ci se tournent maintenant vers les autochtones d'Amérique du Sud afin de poursuivre leurs travaux. Absents sur la photo, Cindy Cantin et France Tardif ont aussi pris part à l'expérience. (Photo : Jeannot Lévesque)
CHICOUTIMI (FSTG) – Ils y sont allés afin de partager leurs connaissances avec les autochtones et d’ouvrir la porte à leur créativité. Sauf que ce sont eux qui en sont revenus les plus transformés.

Voilà qui résume fort bien l’aventure vécue par un groupe d’étudiants-chercheurs de l’Université du Québec à Chicoutimi depuis l’été 2004. Ces huit personnes, inscrites dans différents volets d’études en art, du graphisme au cinéma, se sont lancées dans un projet ambitieux. Elles ont décidé de se rendre sur le terrain, dans trois communautés autochtones de l’Est du Québec, dont Mashteuiatsh et Mani-Utenam, sur la Côte-Nord, afin d’apporter leurs outils et leurs connaissances en création aux artisans de l’endroit.

Au départ, l’objectif était des plus simples, les étudiants voulaient ouvrir d’autres portes à la créativité des autochtones.

« Les artisans autochtones sont des créateurs depuis des centaines d’années. Ils ont leur propre art ancestral. Cependant, ils sont cantonnés, ils se sentent obligés de faire de l’art traditionnel. Nous voulions découvrir leur art et leurs moyens créatifs. Mais nous voulions également leur apporter nos connaissances et nos perceptions, afin que les artisans autochtones puissent aller plus loin et se dépasser », explique Sarah-Emmanuelle Brassard, une des membres de l’expédition.

Durant plusieurs jours d’été en 2004 et en 2005, dans le milieu de vie des autochtones, les étudiants et les artisans se sont découverts. Ils sont allés sur le terrain, dans la forêt ensemble, afin de découvrir des sources d’inspiration et de décortiquer le processus de création. Des expositions itinérantes ont été conçues suite à cette expérience. Des colloques ont eu lieu, dont un les 7 et 8 février dernier à l’UQAC, afin qu’artisans et étudiants puissent faire le point sur cette expérience pour le moins différente.

Et justement, les apprentissages tirés par les intervenants ont de quoi surprendre. Les deux parties ont appris et sont sorties transformées du projet. « Les artisans autochtones nous ont beaucoup appris. Nous avons découvert leur façon de faire, ils nous ont montré leur technique. Une fois la glace brisée, la communication qui s’est créée a été très profitable. Elle a fait tomber les préjugés et la distance entre eux et nous », indique Jean-François Vachon, participant au projet culturel.

« Nous sommes revenus de ces séjours transformés, avec une vision différente de l’art et de la créativité. Nous avons pu redéfinir notre propre identité culturelle, cela nous a fait évoluer dans nos propres champs de discipline. Nous souhaitons que ces effets durent », renchérit Sarah-Emmanuelle Brassard.

Si certains autochtones semblaient sceptiques au début de l’expérience, ceux-ci ont également découvert de nouvelles réalités.

« Je pense qu’ils ont changé leur manière de percevoir leur environnement et leur manière de s’en inspirer. Eux aussi ont pu évoluer vers d’autres formes d’arts» croit Sarah-Emmanuelle Brassard.

Autre effet tangible de cette expérience, les artisans autochtones des communautés consultées ont pu, notamment au cours des colloques, faire le point sur leur art et leur culture. Ils ont ainsi pu identifier certaines de leurs techniques en voie de disparaître en même temps que les derniers artisans qui les maîtrisent, comme une technique permettant de tresser des motifs dans les raquettes traditionnelles.

De plus, les instigateurs de ce projet espèrent que les artisans autochtones profiteront de l’expérience pour élargir leur horizon créatif et prendre plus de place, entre autres dans les musées et dans la diffusion de leur culture.
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