Chronique

Pas facile d’accepter de l’aide

Recherches d’Éric Pilote

CHICOUTIMI – « Nous voyons régulièrement des gens qui ont de la difficulté à recevoir de l’aide, même si les ressources sont présentes, explique le directeur de l’Unité d’enseignement en travail social, Éric Pilote. Les gens n’osent pas. Lorsque j’ai rencontré des Alcooliques Anonymes (AA), par exemple, j’ai constaté qu’ils attendent très longtemps avant d’aller vers les ressources. »

Éric Pilote a réalisé des recherches en lien avec les AA, mais aussi en ce qui a trait aux soins palliatifs et à la santé des hommes (voir autre texte).

Il s’est servi de la théorie du don, afin d’analyser les relations humaines. Le don, selon cette théorie, représente « toute transmission de bien ou de service en vue de créer, maintenir ou nourrir le lien social, sans garantie de retour. »

Fondamental

« Le don est fondamental. Il affecte l’identité des personnes. Quand on donne, on donne un peu de soi. Recevoir, pour les AA par exemple, est un terrain miné. Ils n’ont pas eu beaucoup d’expériences faciles. Quand on reçoit quelque chose, ça affecte notre identité. Les gens sont méfiants. »

Il est très important pour tout le monde de donner et de recevoir, explique monsieur Pilote. « Les gens qui sont privés de donner sont privés de leur dignité humaine. »

Soins palliatifs

Éric Pilote explique que les personnes en phase terminale ont, elles aussi, un grand besoin de donner, et non pas uniquement de recevoir.
« Elles sont si heureuses lorsqu’on leur dit qu’on apprend encore d’elles. Elles ont l’impression qu’elles ne font que recevoir des soins. Donner leur permet d’avoir plus d’estime d’elles-mêmes, plus de confiance. La relation donneur-receveur est importante, dans un sens comme dans l’autre. »

La tentation est forte pour les travailleurs sociaux de vouloir constamment aider et ne jamais recevoir.

« Souvent, les jeunes travailleurs sociaux veulent tout faire. C’est impossible. Il faut qu’ils l’acceptent. »

… plus dur pour les hommes

CHICOUTIMI – « Les hommes voient leur corps comme une machine. Ils désirent se débrouiller seuls et ne demandent que rarement de l’aide. »

Le directeur de l’Unité d’enseignement en travail social à l’UQAC, Éric Pilote, explique que les hommes ont besoin de soins spécifiques, mais que notre société n’est pas nécessairement en mesure de répondre à ces besoins.

En compagnie des professeurs Dominic Bizot (UQAC), Danielle Maltais (UQAC) et Sébastien Savard (Université d’Ottawa), de même que plusieurs étudiants, monsieur Pilote étudie le phénomène de la condition des hommes. Le Centre de prévention du suicide 02 et l’Agence de santé et de services sociaux sont également impliqués.
Au cours des deux dernières années, l’équipe a fait l’inventaire des services donnés aux hommes dans la région.

« Les hommes ne sont pas pris au sérieux. Ils ont des difficultés spécifiques. Ils parlent moins, tentent de se débrouiller seuls. Nous avons fait l’inventaire afin de tenter, éventuellement, de corriger la donne. »

Éric Pilote affirme qu’il faut absolument adapter nos services. Ainsi, les hommes seront davantage portés à parler, de ce qu’ils vivent, à nos professionnels.

« Nous commençons à donner de la formation à nos étudiants pour qu’ils soient au courant de la réalité masculine. La deuxième partie de notre étude est de mettre des groupes d’entraide sur pied. On veut donner des outils aux gars, gérer des conflits dans le but d’éviter des drames. »

Un colloque sur la santé des hommes se tiendra le 23 avril 2010 à l’UQAC.

Le Quotidien, 4 décembre 2009
Un texte de Katerine Belley-Murray