La production épistolaire du XVIe siècle est énorme  ; d’où la nécessité de restreindre la recherche à certains types d’écrits. Au moins quatre types de lettres sont à distinguer : 1) l’épître néo-latine en vers  ; 2) l’épître vernaculaire en vers  ; 3) la lettre néo-latine en prose  ; 4) la lettre vernaculaire en prose. Parmi les dérivés de ce quatrième type, la lettre familière française connaît un succès d’imprimerie remarquable et bénéficie donc d’un rayonnement privilégié. Le Gr@@l voudrait mettre en résonance le corpus constitué par ces lettres avec celui des guides pratiques et théoriques du XVIe siècle afin d’en comparer les structures et de voir si elles participent de ce que l’on pourrait appeler une « rhétorique » de la lettre familière. Y a-t-il, en d’autres termes, constitution d’une ou de plusieurs doctrines auxquelles se rattacherait la pratique renaissante de la lettre familière, ou bien celle-ci est-elle protéiforme et, pour l’essentiel, indépendante de toute école ?  

Le corpus secondaire sera constitué par les ouvrages théoriques et les manuels épistolaires français du Moyen Âge et de la Renaissance. La délimitation du corpus primaire est plus problématique. Par pragmatisme, nous avons choisi de ne considérer que les lettres qui ont été publiées en France à cette époque, négligeant ainsi l’essentiel de la production renaissante qui subsiste vraisemblablement encore à l’état de manuscrit (dans combien de bibliothèques européennes ?). Une telle restriction du corpus, si elle ne garantit pas une perspective globale, permet au moins de tenir compte de l’influence exercée réciproquement par les nombreuses éditions de ces lettres. On peut présumer, en effet, que la constitution d’une « rhétorique de la lettre familière » s’effectue autant par le concours de la pratique que par l’effort normatif. Si les deux divergent, il importe d’en apprécier l’impact sur le genre. Notre étude se limitera donc aux recueils en prose française publiés au XVIe siècle : Hélisenne de Crenne, Les Epistres familieres et invectives (1539) ; Gabriel Simeoni, Epitome de l'origine et succession de la Duche de Ferrare (1553), Etienne du Tronchet, Les Lettres et missives familières (1569) ; Le Premier livre de Gaspar de Saillans (1569), les Missives des dames des Roches (1586),  Les Lettres d’Etienne Pasquier (1586). Bien sûr, ces recueils ne contiennent pas que des lettres familières (et certains n’en comportent peut-être même aucune). L’enjeu sera d’identifier les différents types pour faire ressortir, de manière contrastée, les caractéristiques propres à la forme qui nous intéresse. Pour ne pas trop nous disperser, nous excluons d’emblée et de façon quelque peu arbitraire les lettres familières versifiées (Marot, Bouchet), les lettres amoureuses, les épîtres liminaires publiées ailleurs, les missives insérées dans les œuvres de fiction (Rabelais, Hélisenne de Crenne), de même que celles dont il ne subsiste que des fragments ou comptes rendus (Les lettres missives (1579) et Quelques lettres missives (1579) de Jean de La Gessée). Une étude exhaustive se devrait éventuellement d'en tenir compte ; notre enquête n’a pas cette prétention.

 

 

 



   
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