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Parler de la mort ne fait pas mourir…

Je vous invite à lire ce matin cet article du Devoir qui présente les résultats d’une première recherche qualitative réalisée auprès d’un groupe de médecins impliqués en soins palliatifs et qui partagent leur expérience face aux demandes de patients d’avoir recours à l’aide médicale à mourir. Cette étude a été menée entre janvier et août 2016 au sein de deux unités de soins palliatifs de la région de Montréal. Les résultats ne sont pas encore publiés officiellement mais cette étude «  démontre que bien des zones grises subsistent dans la manière de traiter les demandes d’aide à mourir. »

http://www.ledevoir.com/societe/sante/484493/soins-palliatifs-l-aide-a-mourir-cree-de-l-inconfort

On ne sera pas surpris de ces premiers résultats, la pratique au Québec sur l’aide médicale à mourir est encore bien jeune. Par ailleurs, il est clair qu’une certaine part de la lourdeur des décisions à prendre au plan médical concerne le manque d’informations des patients face à l’AMM. L’expérience de la Belgique qui est d’ailleurs évoquée dans cet article, montre bien le défi que nous devons relever pour éviter une amplification des écueils soulevés par ces premiers résultats.

« Il y a de plus en plus d’intérêt face à l’euthanasie, mais il n’y a jamais eu de véritables campagnes publiques d’information sur les soins de fin de vie en général. Cela manque et entraîne une méconnaissance du public », affirme l’auteure principale de l’étude, Aline de Vleminck, du Centre de recherche sur les soins de fin de vie de l’Université de Ghent et de l’Université libre de Bruxelles ».

Au Québec, l’entrée en vigueur de la loi sur l’AMM n’a pas fait l’objet d’une véritable campagne d’informations. Des juristes, médecins et experts ont pris la parole dans un débat fortement médiatisé qui quelquefois donne priorité aux intérêts corporatifs plus qu’à la réflexion critique. L’expérience de la Belgique donne à penser et je crois que le gouvernement québécois a le devoir éthique d’informer le public pour que les patients qui songent à formuler une telle demande aient accès aux informations pertinentes pour soutenir cette réflexion combien déchirantes. Parler des soins de fin de vie, échanger avec son médecin sur nos valeurs, nos croyances face à cette dernière étape de la vie humaine ne fait pas mourir. Bien au contraire une information juste pourrait permettre à la fois aux patients et aux médecins d’apprivoiser cette nouvelle donne qui bouleverse l’ensemble de nos repères face à la mort et à la vie.

Il y a à peine une année, la mort était pour la majorité d’entre nous la faucheuse qui survenait au moment où l’on s’y attendait le moins. L’AMM ouvre la porte sur une mort planifiée, organisée. Il y a là une fracture dans nos représentations de la mort qui explique à la fois les réticences des médecins et les craintes de nos dirigeants face à un véritable débat public. Cette problématique peut avoir comme principale conséquence de bloquer l’accès aux patients à l’AMM.

La plateforme web Le passage se refera une beauté d’ici quelques mois et l’un de ses objectifs est de proposer un espace éducatif où les personnes qui souhaitent s’informer, débattre et réfléchir sur l’Aide médicale à mourir et les soins de fin de vie pourront le faire et le vivre avec d’autres et aussi avec des personnes ayant la responsabilité de l’implantation de cette pratique. Pour y arriver nous souhaitons s’associer comme partenaire   le CIUSSS du Saguenay Lac Saint Jean afin qu’ils collaborent à ce projet essentiel d’éducation à la mort et au mourir. Nous vous tiendrons informer de ce développement qui, dans mes rêves les plus fous pourrait mener à la création d’ un observatoire régional sur les soins de fin de vie. Ce serait une première québécoise ! Et ce serait ici au Saguenay-Lac-Saint-Jean….Pourquoi pas?