Publications printanières

Trois textes sont récemment parus.

Décrypter les pleurs de bébé

Quel parent ne s’est pas senti désemparé devant les pleurs persistants de son précieux ? Que signifient-ils ? Me frottant à cette réalité depuis peu, ma déformation professionnelle m’a amené à m’intéresser à ce que la recherche en dit. J’ai alors découvert Priscilla Dunstan, chanteuse d’opéra australienne. Ses travaux suggèrent qu’une dizaine de sons caractérisent les pleurs de l’ensemble des bébés. Vous n’entendrez peut-être plus le vôtre comme avant…

Une autre courbe à aplatir!

Depuis mars 2019, s’il y a une expression qui s’est ancrée dans l’imaginaire collectif québécois, c’est bien celle du Dr Arruda quant à la nécessité «d’aplatir la courbe». L’expression était aussi accompagnée d’une gestuelle bien explicite que nous garderons bien en mémoire. Nous sommes d’avis que l’expérience individuelle et collective vécue lors de la pandémie peut maintenant nous guider dans l’aplatissement d’une autre courbe, celle des inégalités scolaires et sociales.

Du tutorat pour… et par les élèves

Le ministre Roberge a lancé récemment son plan de relance pour la réussite scolaire. La mesure au cœur du plan accapare plus de 50 % du budget promis. En dépit de bonnes intentions, le programme de tutorat, tel qu’il est annoncé, risque de manquer sa cible. Voici pourquoi, ainsi qu’une proposition complémentaire.

Liste de livres obligatoires à lire au primaire et au secondaire

Les jeunes caquistes ont récemment proposé qu’un groupe d’experts crée une liste de livres québécois incontournables à lire dans les écoles primaires et secondaires. […] Bien qu’il soit souhaitable de mettre en valeur notre littérature à l’école, voici pourquoi une telle proposition de répertoire n’a pas lieu d’être du point de vue des pratiques éducatives.

Projet de collectif pour la relève professorale

En collaboration avec Frédéric Deschenaux de l’UQAR, j’ai le plaisir de piloter un nouveau projet d’ouvrage collectif visant à réunir des récits de pratique de professeur.es à mi-carrière pour contribuer au développement de la relève professorale dans les universités québécoises. Les FRQ et les PUQ sont partenaires du projet.

Plus de détails ici.

Les chercheurs n’ont pas la tête dans les nuages

« Déconnectés de la réalité. » « Perchés dans une tour d’ivoire. » « Pelleteurs de nuages. » Les expressions qui qualifient l’image qu’ont certaines personnes des chercheurs sont tout aussi colorées que diversifiées. Vous savez quoi ? On est tous un peu chercheurs. Certains choisissent simplement d’en faire une profession qui, malgré les apparences, est bien stimulante.

Texte paru le 9 octobre 2020 dans Le Quotidien.
Par Stéphane Allaire

Regard sur l’éducation en sept minutes après sept mois de pandémie

NOTE: Ce texte reprend les principales idées d’une communication dans le cadre de l’activité spéciale organisée par le CTREQ le 7 octobre 2020.

J’aimerais d’abord remercier le CTREQ pour l’invitation. C’est un plaisir de participer à ce panel en compagnie des autres intervenants.

Mon propos va s’articuler en trois temps. D’abord, j’expliquerai trois points positifs résultant de la situation de pandémie. Ensuite, je vais présenter une lacune de notre système qui est mise en exergue par la crise sanitaire. Je conclurai en partageant un espoir.

Points positifs

Le premier point positif de la pandémie, c’est qu’on n’a jamais autant entendu parler de science et de recherche. Leur impact sur chacun de nous et sur le fonctionnement des sociétés est évident plus que jamais. Et ça concerne tout autant l’éducation que la santé. On comprend mieux les retombées de la recherche, mais aussi la nature de ce travail. Par exemple, on constate que même si on est dans l’urgence, une solution sérieuse à un problème complexe, ça prend du temps à trouver!

Il faut toutefois faire attention à l’association qu’on fait lorsqu’on parle d’impact concret de la science. Ça ne concerne pas que la recherche appliquée. Aujourd’hui, la solution à la pandémie dépend en grande partie de la recherche fondamentale. Malheureusement, on ne la reconnait pas toujours à sa pleine valeur.

Par exemple, saviez-vous que, sous prétexte que la H1N1 a peu touché l’Amérique du Nord, on a arrêté de financer des études en 2009 qui aujourd’hui auraient pu nous aider à comprendre plus rapidement des aspects de la COVID-19?

Même si les impacts de la recherche fondamentale sont souvent différés dans le temps, on réalise qu’elle a autant de pertinence et de nécessité que les autres formes de recherche.

Comme second point positif, je dirais que la pandémie a amené des parents à mieux comprendre toute l’exigence du travail des enseignants.

Rappelons-nous la difficile conciliation du télétravail et de la gestion des enfants à la maison lors du confinement prolongé au printemps. Il semble qu’un certain mouvement de reconnaissance implicite à l’égard des enseignants en ait découlée. Compte tenu de l’importance de la relation école-famille, cette prise de conscience me semble des plus positives.

Comme troisième point favorable découlant de la pandémie, je vais aborder la prise de conscience accrue quant à la pertinence de la mission de socialisation de l’école.

Rappelons-nous l’évolution du discours dans les médias le printemps passé. Au début, on craignait qu’il manque des apprentissages aux élèves. Ensuite, c’est l’annulation des examens qui a donné lieu à une crainte. Celle de l’incapacité de statuer sur le niveau de progression des élèves. Comme s’il n’y avait pas d’autres moyens d’y parvenir… Enfin, on a réalisé la solitude que les jeunes ont vécue. Une étude de collègues de l’UQO se penche d’ailleurs sur cette question actuellement.

Évidemment, les volets d’éducation et de qualification de la mission de l’école québécoise sont importants. La pandémie nous rappelle que la socialisation est aussi un aspect majeur dans le développement d’une personne.

Lacune

Je vais poursuivre en expliquant une lacune de notre système qui est mise en exergue par la pandémie. Une autre lacune que l’évidente et désolante accentuation des inégalités.

Je vais plutôt parler de l’organisation scolaire au secondaire. Une organisation statique, pour ne pas dire figée dans le temps. Une organisation qui offre peu de flexibilité dans la façon de dispenser l’enseignement. Par exemple en mode hybride. Pourtant, en implantant un enseignement hybride dès le début de l’année scolaire 2020-2021, on aurait pu offrir une nécessaire stabilité et prévisibilité aux élèves, tout en conservant un lien social et en diminuant les risques de propagation du virus via le milieu scolaire.

Comment se fait-il qu’on n’ait pas planifié un tel mode d’enseignement et qu’on doive maintenant y recourir comme pis-aller dans les zones rouges depuis quelques jours?

Je vais avancer deux pistes de réflexion à ce sujet. La première : la pandémie nous met devant notre difficulté collective à formaliser des innovations à l’ensemble du système. Parce que des initiatives et des modèles porteurs, il en existe au Québec. Il s’en développe depuis plus 20 ans. Malheureusement, on parvient trop peu à déployer ces initiatives de façon étendue et à les intégrer aux structures existantes pour qu’elles ne soient plus des à-côtés. Résultat : notre organisation scolaire statique les tolère, sans s’en inspirer pour se transformer plus en profondeur.

Une seconde piste d’explication réside dans le financement du numérique en éducation. La pandémie illustre que les investissements ont principalement ciblé la quincaillerie intramurale plutôt que le développement d’une capacité socionumérique collective.

Par capacité socionumérique, j’entends l’usage du numérique pour tisser et maintenir du lien social, de la collaboration, une relation pédagogique et des interactions à des fins d’apprentissage. Le numérique, c’est autre chose que des outils. C’est autre chose qu’un portail de sites Web. C’est une posture. C’est du relationnel qui peut dépasser les murs d’une classe. On y a trop peu porté attention et on en voit des limites importantes aujourd’hui par rapport à notre capacité à adapter l’organisation scolaire à la situation de crise.

Espoir

Je termine sur une note positive en y allant d’un espoir.

Dans la gestion de la pandémie, on consulte à peu près tous les spécialistes concernés. Virologues, psychologues, pédiatres… Nommez-les! On les consulte tous, sauf les enseignants. Pourtant, ce sont les personnes qui sont en première ligne dans les classes.

Ce n’est pas d’hier que les enseignants ont l’impression qu’on considère peu la réalité de leur pratique. Mais ce sentiment semble atteindre un point de rupture pendant la pandémie. C’est désolant. Mais il y a un quand même un espoir. Une nouvelle voix s’élève pour les enseignants.

Un enseignant au secondaire de la région de Québec est en train de mettre sur pied une association pour faire valoir la perspective spécifique des enseignants. Cette initiative, qui est portée par et pour les enseignants, est rafraichissante. J’espère qu’elle réussira à rassembler le plus de gens possible. Si ça vous intéresse, vous pouvez suivre les publications de Sylvain Dancause, le porteur de l’initiative.

Je m’arrête ici. Merci de votre attention. Il me fera plaisir de recevoir vos commentaires et de répondre à vos questions.

L’université québécoise du futur

L’université québécoise du futur: tendances, enjeux, pistes d’action et recommandations.
Paru il y a environ deux semaines, le document édité par les Fonds de recherche du Québec (FRQ) rend compte de la réflexion d’un « groupe d’une douzaine de personnes [qui] a réfléchi sur les exigences de l’université québécoise du futur dans le cadre de 12 rencontres […] ».
Quelques commentaires à brûle-pourpoint…
Très bon topo des grandes tendances susceptibles d’influencer l’université du futur.
Portrait évolutif riche de plusieurs variables concernant le milieu universitaire. Des annexes encore plus détaillées sont en préparation pour ceux qui ne seraient pas rassasiés.
L’importance de la liberté académique et de l’autonomie institutionnelle est, à juste titre, réitérée à plusieurs reprises. En espérant maintenant qu’elles ne se feront pas avaler par la reddition de comptes (que le rapport suggère d’ailleurs de simplifier) ni par les modes de gestion chiffrées qui sont en croissance.
– Une surprise
À l’exception d’une étudiante de premier cycle, aucun représentant des « grosses » universités sur le comité de travail. Ça laisse un peu pantois.
– Un défi de funambule
Autant on affirme l’importance de la recherche théorique et fondamentale, autant plusieurs recommandations ont des allures d’utilitarisme. La conciliation s’annonce un défi de taille.
– Une autre surprise
L’accent mis sur l’importance de réfléchir à des environnements d’apprentissage renouvelés. J’en suis convaincu depuis longtemps, mais de constater qu’un document édité par un bailleur de fonds de recherche pèse aussi fort sur cet aspect est rafraichissant. Il reste maintenant à souhaiter qu’on fera appel aux gens des sciences de l’éducation pour étayer le tout, car il faudra davantage que « Captiver pour réussir la formation» (intitulé du 2e enjeu) afin de relever le défi.
– Un angle mort
Par rapport au point précédent, on fait fi de la nécessité de développer une culture de la pédagogie universitaire.
– Un éléphant dans la pièce
Le financement des universités par la philanthropie, qu’on aborde du bout des lèvres, mais qui crée pourtant des disparités importantes au sein du réseau québécois. Il faudra oser ouvrir cette boite de pandore si on souhaite que le voeu d’une collaboration interuniversitaire accrue en formation se concrétise.
– Une évidence
La place octroyée au numérique.
– Des recommandations précises et porteuses d’avenir.
Beaucoup de boulot attend les universités!
– Un sujet que j’aurais aimé voir traité
En plus du discours d’excellence en recherche, pourrait-on aussi réfléchir au déploiement du plein potentiel en recherche? La concentration du financement en recherche et la présence de l’effet Matthew sont assez bien documentés. Ils ont pour conséquence de laisser toute une frange de chercheurs sans moyen. Pourtant, même s’ils n’ont pas remporté un concours d’excellence (on pourrait aussi discuter des critères d’excellence), leur compétence en recherche n’est pas caduque. Comment mobiliser leur talent sachant l’éventail de besoins rencontrés par la société?
– Un point d’attention
Oui à une université pour aider à relever les grands enjeux de notre siècle. Oui à une université qui prépare au marché du travail. Mais il y a autre chose à préserver qui relève « simplement » et purement du développement de la pensée humaine, et ce, indépendamment du champ d’étude. Sans dire que cet aspect n’est pas abordé dans le rapport, il finit un peu par être dilué à travers tout le reste.
– Conclusion
Un document qui met très bien la table à des discussions au sein de nos institutions et entre elles.
Bravo à tout le comité de travail!