De la croissance à la musique

La croissance des arbres

Tous les ans, les arbres augmentent en circonférence en produisant du bois. Ce processus n’est toutefois pas continu en raison du cycle des saisons dans les forêts tempérées et boréales. Les arbres sont ainsi en dormance durant l’hiver, créant une discontinuité dans la formation de bois, visible sous la forme de cernes de croissance.

Cernes de croissance sur la rondelle de pied d’un sapin baumier

La quantité de bois produite annuellement par un arbre, donc la largeur du cerne de croissance, dépend de multiples facteurs. Plusieurs éléments peuvent donc négativement affecter la croissance d’un arbre. Elle sera ainsi faible si :

– l’arbre devient trop vieux

– les conditions climatiques de l’année sont mauvaises

– l’arbre est attaqué par un insecte (par exemple la tordeuse des bourgeons de l’épinette) ou un champignon

– la lumière est bloquée par de plus grands arbres (photosynthèse limitée)

– l’arbre pousse dans un environnement inadapté

En analysant la taille des cernes de croissance d’un arbre, il est ainsi possible de reconstruire de son histoire et de la comparer avec celle d’autres arbres. Cette méthode s’appelle la dendrochronologie. Par extension, nous pouvons aussi comparer le vécu de plusieurs forêts en se basant sur ces informations

Lors des premières années de sa vie (à gauche), ce sapin baumier se trouvait sous le couvert d’arbres plus grands que lui, bloquant donc son accès à la lumière et par conséquent limitant sa photosynthèse. Cette croissance est donc assez faible. Toutefois, les arbres situés au-dessus de lui sont morts l’année marquée par la flèche rouge. Désormais libre de toute compétition, il a ainsi pu augmenter sa croissance dans les années qui suivent

De la croissance à la musique

Afin d’obtenir nos symphonies, nous avons attribué pour chaque cerne de croissance une note de musique relative à sa largeur. Plus le cerne de croissance est fin et plus la note est grave. Au contraire, plus il est large et plus la note est aigue.

En mesurant la largeur de l’ensemble des cernes de croissance d’un arbre, il devient ainsi possible d’attribuer une note à chacun de ces cernes, et par conséquent d’obtenir une mélodie propre à cet arbre.

Illustration de la relation entre la longueur des cernes de croissance et les notes jouées sur une section de rondelle. Plus les notes se situent haut sur la partition et plus elles sont aigües

Chaque note jouée correspond donc à une année de croissance. Cela signifie que plus une symphonie sera longue, plus les arbres qui la compose sont vieux.

Les forêts derrière les symphonies

En mesurant la largeur des cernes de croissance de chacune de ces rondelles, nous avons alors pu créer une mélodie pour l’ensemble des arbres échantillonnés.

Ces 755 mélodies ont alors été regroupées par peuplement et synchronisées. Nous avons alors obtenu 21 « symphonies », chacune retraçant la croissance annuelle des arbres qui la compose.

Comparaison de la taille des cernes de croissance d’une épinette noire de 86 ans (la plus grande) ayant poussé dans d’excellentes condition et d’une épinette noire de 272 ans (la plus petite) ayant poussé dans une tourbière

Pour les plus curieux, sachez que l’ensemble des mélodies utilisées dans ce projet ont été obtenue par la conversion des valeurs brutes de croissance en notes de musique en utilisant le logiciel R accompagné des packages audio et seewave . Aucun instrument n’a donc été utilisé pour créer les symphonies boréales. Toute personne désirant rejouer ces symphonies, qu’importe son instrument, est par contre la bienvenue!