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Collection « Les auteur(e)s classiques »

La mentalité primitive (1922)
Avant-propos


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Lucien Lévy-Bruhl, La mentalité primitive. Paris : Les Presses universitaires de France. Collection Bibliothèque de philosophie contemporaine. Première édition, 1922. 15e édition, 1960, 544 pages.

AVANT-PROPOS

Par Lucien Lévy-Bruhl, septembre 1921

Quand Les fonctions mentales dans les sociétés inférieures parurent, il y a douze ans, ce livre aurait déjà dû s'appeler La mentalité primitive. Mais parce que les expressions «mentalité» et même«primitive» n'étaient pas encore entrées, comme aujourd'hui, dans le langage courant, j'ai renoncé alors à ce titre. Je le reprends pour le présent ouvrage. C'est assez dire qu'il fait suite au précédent. Ils traitent tous les deux du même sujet, quoique d'un point de vue assez différent. Les fonctions mentales avaient insisté surtout sur la loi de participation, considérée dans ses rapports avec le principe d'identité, et sur le fait que l'esprit des primitifs est peu sensible à la contradiction. La mentalité primitive a plutôt pour objet de montrer ce qu'est pour eux la causalité, et les conséquences qui découlent de l'idée qu'ils s'en font.

Elle ne prétend pas plus que Les fonctions mentales à épuiser l'étude de la mentalité primitive, sous tous ses aspects et dans ses multiples expressions. Il ne s'agit, ici encore, que d'une introduction générale. J'ai cherché simplement à déterminer, de la façon la plus exacte possible l'orientation propre de cette mentalité, de quelles données elle dispose, comment elle les acquiert, quel usage elle en fait : en un mot, quels sont les cadres et le contenu de son expérience. Ce faisant, j'ai été amené à essayer de dégager et de décrire certaines habitudes mentales caractéristiques des primitifs, et de montrer pourquoi et comment elles diffèrent des nôtres.

Afin de saisir, pour ainsi dire sur le fait, les démarches essentielles de la mentalité primitive, j'ai choisi à dessein, pour les analyser, les faits les plus simples et les moins ambigus. Je pouvais espérer, par ce moyen, voir diminuer les chances d'erreur, si nombreuses en une matière si complexe, et faire apparaître plus clairement, dans leur jeu même, les principes constitutifs de cette mentalité. Je me suis ainsi attaché à étudier ce que sont, pour les primitifs, les puissances invisibles dont ils se sentent entourés de toutes parts, les songes, les présages qu'ils observent ou provoquent, les ordalies, la « mauvaise mort », les objets extraordinaires apportés par les blancs, leur médecine, etc.

On ne s'attendra donc pas à trouver ici une étude de la mentalité primitive dans ses rapports avec les techniques des sociétés inférieures (invention et perfectionnement des outils et des armes, domestication des animaux, construction d'édifices, culture du sol, etc.), ou avec leurs institutions parfois si complexes telles que l'organisation de la famille ou le totémisme.

Si l'introduction générale que constitue le présent volume, joint au précédent, a atteint son but, elle permettra précisément de mieux définir quelques-uns des grands problèmes soulevés par les institutions, les techniques, les arts et les langues des primitifs. La connaissance de leurs habitudes mentales, en tant qu'elles se distinguent des nôtres, aidera à poser les questions en des termes qui n'en rendent pas impossible la solution. Elle fournira une sorte de fil conducteur. Il deviendra moins difficile, du moins dans un certain nombre de cas, de discerner les fins que les primitifs poursuivent plus ou moins consciemment. On comprendra mieux les moyens, parfois enfantins ou absurdes à nos yeux, qu'ils sont conduits à employer, et l'on remontera ainsi aux raisons profondes qui expliquent les formes ordinaires de leur activité, soit individuelle, soit sociale. Plusieurs chapitres du présent ouvrage sont des essais d'application de cette méthode à des cas relativement simples.

Il m'a semblé que leurs résultats confirmaient l'analyse abstraite qui a été exposée dans Les foncions mentales. En me fondant sur elle, en effet, j'ai pu rendre compte d'un certain nombre de faits, inexpliqués jusqu'à présent, ou que l'on interprétait par le moyen d'hypothèses simplement vraisemblables, sinon arbitraires. Les deux ouvrages se prêtent ainsi un mutuel appui. Ils procèdent tous deux d'un même effort pour pénétrer dans les modes de pensée et dans les principes d'action de ces hommes que nous appelons, bien improprement, primitifs, et qui sont à la fois si loin et si près de nous .

Septembre 1921.

Retour à l'ouvrage de l'auteur: Lucien Lévy-Bruhl Dernière mise à jour de cette page le dimanche 23 avril 2006 12:59
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue.
 



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