Chronique

Un nouvel outil pour les agriculteurs : la télédétection

AGRICULTURE – Les applications de la télédétection et de l'imagerie satellite permettent au professeur Driss Haboudane de travailler au développement d'une nouvelle forme d'analyse des sols cultivés, ce qui pave la voie à une agriculture plus efficace et moins polluante. Mustapha Bahri, étudiant à la maîtrise en Ressources renouvelables – cheminement télédétection – et le professeur Driss Haboudane se trouvent ici dans leur laboratoire de l'UQAC.
CHICOUTIMI (FSTG) – Grâce aux travaux de l’Université du Québec à Chicoutimi, l’agriculture a maintenant un lien direct avec les images satellites et la télédétection.

Depuis 2003, le professeur-chercheur Driss Haboudane et son équipe d’étudiants travaillent à redéfinir les pratiques traditionnelles de l’agriculture. À partir d’images à haute définition prises à des kilomètres d’altitude, ceux-ci mettent au point de nouveaux modèles permettant d’identifier les propriétés des sols, leurs problèmes et les correctifs précis à y apporter. Finie l’époque où la meilleure et seule solution pour favoriser la croissance des végétaux consistait à épandre d’énormes concentrations d’engrais.

« La télédétection permet de voir des éléments imperceptibles à l’œil nu à partir des airs. Un champ n’est jamais complètement homogène. Sa composition et ses caractéristiques varient. En analysant en détails sa nature, nous pouvons déterminer ce qui s’y passe dans les moindres détails. Nous pouvons identifier les zones problématiques, les sources des problèmes et les correctifs précis à effectuer. Certains endroits n’ont pas besoin d’engrais, d’autres peuvent avoir besoin de plus de drainage ou de certains fertilisants », explique M. Haboudane.

Ce qui rend de telles analyses possibles, c’est la signature spectrographique propre à chaque élément. Comme les images satellites emploient l’ensemble du spectre de la lumière, et non pas uniquement le spectre visible à l’œil, il est possible d’en décortiquer les caractéristiques de réflexion et d’absorption, donc la signature. Ce qui permet de « voir » avec une précision parfaite, la présence de minéraux dans les sols, l’épaisseur du couvert feuillu et même le niveau de stress des végétaux d’une zone donnée…

« Cela permet l’agriculture de précision, avec les bonnes mesures appliquées aux bons endroits aux bons moments. Les agriculteurs peuvent ainsi épandre l’engrais efficacement, réduisant la pollution tout en ayant un meilleur rendement. C’est un élément important à une époque de lutte contre la pollution, alors que la population ne cesse de croître et que la superficie de terres arables disponibles diminue », illustre le professeur-chercheur.

Ce dernier se réjouit que de plus en plus d’agriculteurs se montrent intéressés par les nouvelles méthodes d’analyse développées à l’UQAC. Des producteurs de pommes de terre de la région ont même déjà commencé à les utiliser et à créer des registres des sols.
Driss Haboudane souhaite aller plus loin dans l’étude des sols à partir de la télédétection.

Un projet de recherche en préparation prévoit faire l’analyse des teneurs en azote et en carbone contenus dans les végétaux présents dans les champs afin de déterminer, selon les zones, la quantité de ces éléments qui demeure dans les sols après les récoltes et celle qui s’échappe dans l’atmosphère. Selon le professeur, une meilleure compréhension de ces phénomènes permettrait de connaître la concentration de fertilisant requis et le niveau de gaz à effet de serre libéré dans l’atmosphère.

Imagerie satellite
À la rescousse de la forêt et des bleuets

CHICOUTIMI (FSTG) – Après l’agriculture de précision, les nouvelles percées en télédétection mises au point dans les laboratoires de l’UQAC seront utilisées dans la forêt boréale régionale mais aussi dans les bleuetières.

Le professeur-chercheur Driss Haboudane confirme s’entretenir régulièrement avec ses collègues qui étudient l’état de la ressource forestière. Selon lui, l’évaluation des caractéristiques des sols et l’analyse de son niveau de dégradation pourraient apporter une meilleure compréhension du potentiel forestier régional, information importante dans le contexte actuel.

Il souligne aussi que les registres des sols en voie d’être constitués pourraient aussi être utilisés par les producteurs de bleuets soucieux d’accroître leur production.

En attendant, le professeur Haboudane et son équipe d’étudiants travaillent sur une fabuleuse région du monde située à quelques milliers de kilomètres du Saguenay.

Les spécialistes en télédétection de l’UQAC mettent actuellement au point des cartes détaillées des cédrières ancestrales des monts Atlas, au Maroc, dans le but de délimiter les zones les plus menacées par l’homme et celles où la croissance est à prévoir.