Chronique

Comment se constitue l’identité des femmes ?

RECHERCHE - Anne-Martine Parent veut comprendre comment se constitue l'identité sexuelle des femmes à travers la littérature contemporaine des femmes. (Photo: Rocket Lavoie)
CHICOUTIMI – En cette Semaine internationale de la femme, Anne-Martine Parent, enseignante à l’UQAC, nous livre sa passion pour la littérature des femmes et nous parle de ses recherches sur la constitution de l’identité sexuelle des femmes à travers la littérature contemporaine. De quoi suis-je faite, voilà le sujet de ses recherches. « Je veux découvrir à travers les récits autobiographiques des femmes comment se constitue leur identité. Je veux savoir à partir de quoi elles se sont faites car on ne naît pas femme, on le devient », raconte Anne-Martine Parent, professeure au département des arts et lettres de l’UQAC.

En fait, Mme Parent souligne qu’à la naissance aucun enfant ne sait quel rôle il va jouer dans la société. C’est en grandissant qu’il apprend comment être un garçon et comment être une fille. « Nous sommes le produit de notre famille. Nous sommes façonnés à l’image de notre entourage. Être soi-même est une illusion », précise Mme Parent.

Pour mieux comprendre la femme, elle travaille avec les romans autobiographiques. « À travers les pages de leurs romans, les écrivaines se questionnent et parlent de leur famille », explique Mme Parent. Comprendre l’héritage, les forces et les richesses qui ont construit ces femmes, c’est le défi qu’elle veut relever.

Au total, c’est 18 livres qu’Anne-Martine Parent va déchiffrer, phrase par phrase, mot à mot. Plusieurs écrivaines québécoises et françaises sont à l’honneur, notamment Annie Ernaux, Christine Angot, Nina Bouraoui, Diane- Monique Daviau et Francine Noël. Afin de mieux analyser leurs écrits, elle utilise des notions de psychanalyse. « Je me base sur des textes en psychanalyse pour poser une question aux récits. Je m’attarde aux citations, je les lis et les relis car c’est seulement lorsque l’on connaît la fin qu’on porte attention aux détails », confie Mme Parent.

19e siècle

La littérature des femmes n’est pas très ancienne. « Il faut attendre au 19e siècle pour voir apparaître réellement la littérature des femmes. Avant, la littérature était réservée aux hommes. Les femmes ne pouvaient même pas aller seules dans les grandes bibliothèques, l’entrée leur était interdite », raconte lq professeure. Grâce à l’évolution du féminisme et à l’accès à l’éducation pour les femmes, ces dernières ont réussi à intégrer le monde de la littérature.

Toutefois, Anne-Martine Parent admet qu’il faut du temps et de la disponibilité pour se livrer à l’écriture d’une oeuvre et c’est pourquoi aucune des grandes écrivaines du 19e siècle n’avait d’enfant. « Comme l’a si bien exprimé Virginia Woolf, une figure marquante de la société littéraire londonienne, il faut avoir de l’argent et une chambre à soi pour écrire », cite Mme Parent. C’est une des raisons qui explique que peu de femmes s’exprimaient à l’aide de leur plume. Heureusement, les temps ont bien changé. « En ce moment, la littérature des femmes est riche et vivante. Par contre, il y a encore beaucoup de préjugés et une notion péjorative colle aux auteurs féminins. Il reste encore du chemin à faire », conclut Anne-Martine Parent.

Un texte de Catherine Bergeron
cbergeron@lequotidien.com