Chronique

« Le seul moyen que j’ai de m’épanouir » Moussa Sinare, étudiant au programme de maîtrise en géologie

« Aller à l'université ne coûte pas cher, mais quand les gens n'ont pas d'argent pour se payer à manger ou pour se loger, ils n'en ont pas non plus pour aller à l'école », constate Moussa Sinare, soulignant néanmoins qu'il vient de l'une des familles les plus pauvres du Burkina Faso. (Photo Jeannot Lévesque)
CHICOUTIMI – Moussa Sinare vient d’une famille très modeste du Burkina Faso, un pays au sein duquel moins de 22 pour cent des adultes savent lire et écrire. Faisant fi de toutes les statistiques qui lui prédisaient un avenir peu prometteur, Moussa a décidé de s’instruire. « L’instruction, c’est le seul moyen que j’ai de m’épanouir. » Et aujourd’hui, il étudie à l’UQAC!

S’il doit son passage au Saguenay c’est en grande partie à son courage et à sa détermination, Moussa Sinare peut aussi dire un gros merci à la Fondation SEMAFO.

SEMAFO est une société minière québécoise qui a des activités de production et d’exploration aurifères en Afrique Occidentale. La Société exploite trois mines d’or : la mine Mana au Burkina Faso, la mine Samira Hill au Niger et la mine Kiniero en Guinée. Moussa, après avoir terminé son baccalauréat en sciences de la terre à l’Université de Ouagadougou, a été engagé par SEMAFO. Constatant le grand potentiel de cet employé, les dirigeants de l’entreprise ont proposé à M. Sinare de participer à un projet bien particulier.

Il est arrivé ici au début de la dernière session afin de faire une maîtrise. En janvier, après avoir passé un premier Noël sous la neige, il partira rejoindre sa femme et son fils au Burkina Faso. Il travaillera à ce moment pour SEMAFO. Puis, en septembre prochain, il reviendra au pays des bleuets. Par la suite, la possibilité d’une carrière de cadre chez SEMAFO s’offrira à lui. « La Fondation SEMAFO a mis à ma disposition des conditions qui m’ont encouragé à poursuivre mes études. C’est une opportunité qui vaut la peine. Depuis que je suis très jeune que j’aime aller à l’école, et je crois que c’est par l’instruction que je parviendrai à mener une belle vie », explique l’homme de 31 ans.

La langue maternelle des Burkinabés est le français. Moussa Sinare le parle d’ailleurs de manière remarquable. Selon les statistiques du World Factbook de la CIA, les habitants du Burkina Faso vont à l’école en moyenne six ans. C’est donc dire qu’ils arrêtent après le primaire.

« Aller à l’université ne coûte pas cher, mais quand les gens n’ont pas d’argent pour se payer à manger ou pour se loger, ils n’en ont pas non plus pour aller à l’école », constate-t-il, soulignant néanmoins qu’il vient de l’une des familles les plus pauvres du Burkina Faso. Moussa est le seul des cinq enfants de sa famille à avoir obtenu un diplôme universitaire.

La structure de SEMAFO est très particulière : elle emploie environ 2 200 personnes dans trois pays d’Afrique. De ce nombre, plus de 90 % sont d’origine africaine. Les autres sont des Québécois expatriés, pour la plupart venant de l’Abitibi. « Cette entreprise est très bien vue en Afrique parce qu’elle engage et forme des jeunes de nos pays. Tout ce que l’on peut espérer, c’est que la compagnie poursuive sur cette lancée », mentionne-t-il.

Pas dans un bureau

Moussa Sinare a choisi de poursuivre ses études. Et il a choisi un domaine qui l’intéressait énormément. « Je ne voulais pas passer mes journées assis dans un bureau. Je voulais un travail demandant physiquement et intellectuellement. C’est ce que me procure le travail de géologue. Quand je termine une journée, je n’ai pas besoin d’aller au Pavillon sportif! »

Moussa Sinare mentionne avoir beaucoup appris au Canada, et pas seulement en lien avec la géologie.

« Il est clair que les Québécois vivent confortablement. Je pense quand même que je peux ramener certaines choses au Burkina Faso. Chez nous, la ponctualité ne fait pas partie des mentalités, il y a un laxisme par rapport à ça. Il faudrait parvenir à être plus ponctuels. Les Canadiens ont aussi beaucoup de rigueur », mentionne celui qui habite en famille d’accueil chez Jean-Marie Gagnon et Thérèse Girard, de Chicoutimi. « Le fait de vivre dans une famille d’accueil m’a permis de mieux connaître la culture et de l’apprécier. »

Un texte de Katerine Belley-Murray

Le Quotidien
Samedi, 4 décembre 2010, p. 24