Chaire de recherche

Description

L’objectif de cette chaire est d’étudier dans une perspective comparée la dynamique des imaginaires collectifs : comment ils se forment, comment ils sont structurés, comment ils se transforment au fil du temps et comment ils sont alimentés par les mythes. Par cette notion d’imaginaire collectif, je désigne l’ensemble des repères symboliques à l’aide desquels une collectivité s’inscrit dans l’espace et dans le temps. Ce processus d’inscription comporte la mise en œuvre de six types de rapport :

  • Un rapport à l’espace, d’où résulte une territorialité, un habitat
  • Un rapport à soi et aux autres, d’où résulte une identité
  • Un rapport au passé, qui s’exprime dans une mémoire
  • Un rapport à l’avenir, qui s’exprime dans des utopies ou dystopies de prestige premières
  • Un rapport au social, d’où découle un statut dans une hiérarchie
  • Un rapport à la vie et à l’univers, qui instaure un réseau de significations

La programmation de recherche œuvre sur deux grandes directions, toutes deux accordant une place centrale aux mythes :

1. Au sein des imaginaires collectifs, je m’intéresse tout particulièrement aux pratiques (stratégies, procédés) discursives qui entrent dans la construction de la pensée. Celle-ci est définie comme un alliage de raison et de mythe. Au départ de toute entreprise d’énonciation, la raison est confrontée à la contradiction. Elle parvient à la surmonter ou à la contourner en faisant intervenir des mythes. Cette opération n’est pas toujours réussie, d’où une diversité de scénarios ou de situations qui se prêtent à l’élaboration de typologies.

Cet arrière-plan analytique ouvre, comme on le devine, sur des perspectives très larges et sur plusieurs directions de recherche. Je m’intéresse aux pratiques discursives à diverses périodes et dans diverses cultures, au sein desquelles j’essaie de déceler des similitudes, des récurrences, sinon une sorte de grammaire. Je m’intéresse tout autant aux mythes mobilisés par les discours ainsi qu’aux conditions de leur efficacité. Enfin, je porte attention aux coordonnées et aux répercussions sociales des imaginaires collectifs, ce qui pose la question générale de l’articulation du culturel et du social. Les recherches recouvrent donc divers domaines disciplinaires (ethnologie, sociologie, philosophie, théologie, histoire, littérature…) et elles font appel à un ample matériau relevant de chacune de ces disciplines.

Parmi les questions principales qui orientent présentement mes travaux, je mentionne, à titre d’illustration : Comment rendre compte de la prédominance et de la perpétuation des structures de pensée dans une société donnée à un moment ou l’autre de son histoire? Quels facteurs (internes, externes) expliquent les transformations qui surviennent dans les structures des imaginaires collectifs? Quelles sont les différentes formes d’alliance que la raison en vient à contracter avec le mythe? Comment le mythe prend-il place dans un imaginaire? Comment opère le changement dans un imaginaire collectif? Parmi les mouvements qu’on y observe, comment reconnaître ceux qui relèvent de l’adaptation, de la transition, de la crise? Les cultures des sociétés occidentales sont-elles présentement en crise?

2. La deuxième direction met en œuvre une approche sociale des mythes, en tant que mécanisme sociologique universel. Elle s’organise autour de l’idée que les mythes sont créés dans des contextes particuliers par des acteurs sociaux qui s’en servent pour promouvoir leur agenda, d’où l’importance du rapport aux pouvoirs.

Une question centrale commande mes analyses: comment un symbole ou une idée quelconque en vient-elle à acquérir une grande efficacité sociale et à exercer un pouvoir qui lui permet soit de provoquer, soit de prévenir un changement social? Cette question ouvre sur un large éventail de sous-questions, par exemple:

  • Qu’est-ce qui permet aux sociétés de se mobiliser autour d’objectifs ou de finalités spécifiques?
  • Ou de colmater des divisions, de gérer efficacement leurs tensions et leurs conflits?
  • Ou encore : qu’est-ce qui donne aux sociétés le moyen de se regrouper et de réagir énergiquement après une crise, après un traumatisme

D’une façon ou d’une autre, toutes ces questions entretiennent un rapport avec la culture -et plus spécifiquement avec les fondements symboliques d’une société, lesquels sont constitués principalement de mythes.

Les mythes nationaux sont l’une des figures visées par cette approche qui s’ouvre cependant à l’ensemble des mythes des collectivités humaines.

Projets

  1. Recherches théoriques sur la structure et le fonctionnement des imaginaires collectifs, avec un accent sur les mythes
    La place du mythe au sein des imaginaires collectifs.
  2. Étude comparative des mythes nationaux
    Où en sont les mythes nationaux ? Sont-ils encore utiles ? Quels rôles remplissent-ils ? Y-a-t-il un avenir pour les mythes nationaux dans une ère postmoderne ?
  3. La Révolution tranquille au Québec dans les années 60
    Suivant une perspective culturelle, analyse des changements qui se sont imposés et de ceux qui sont restés dans l’ombre. La Révolution tranquille : un épisode de changement radical ou une entreprise inachevée ?
  4. Les mythes de l’Union européenne
    L’Europe souffre-t-elle d’un excès ou d’un déficit de mythes ?

Bibliographie

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