Carrefour

15e Colloque annuel du RÉDiST

État des connaissances sur le contexte pétrologique, stratigraphique et structural des minéralisations en chromite-ÉGP du Complexe Ophiolitique de Thetford-Mines, Québec

Jean H. Bédard, Ress.Nat.Can. CGC-Québec, 880 Ste-Foy, PQ, G1V 4C7

Résumé de conférence

Les principales ophiolites des Appalaches du Québec (Thetford Mines, COTM 478 Ma; Asbestos, COA) représentent un domaine péricontinental avant-arc marginal de l'océan Iapetus, mis en place sur la marge laurentienne au cours de l'orogénie Taconienne. Les chromitites intra-mantelliques du COTM sont probablement des engorgements de chromite dans des chenaux magmatiques. La minéralisation en ÉGP y est rare. Des chromitites stratiformes (type Reid-Bélanger) situées près de la limite croûte/manteau forment des séquences rhythmiques dunite/chromitite. Beaucoup sont des filons-couches. Des inclusions platinifères peuvent existent dans les chromites (e.g. £ 581 ppb Pt+Pd à American Chrome Jr.). Au-dessus de la Zone Dunitique, les cumulats de la Zone Pyroxénitique sont dominés par la webstérite. Des valeurs économiques sans minéralisation visible (768 ppb Pt+Pd, Lac Bisby) suggèrent une analogie avec le gîte Lac des îles. Les modélisations inverses indiquent que la plupart des roches cumulatives (dunite à gabbro) sont d'affinité boninitique. Les chromitites de Hall et Star Chrome sont enrichis en ÉGP, et sont situés dans la Zone Pyroxénitique. Hall a des teneurs (moy.) de 2230 ppb ÉGP, 1438 ppb Pt+Pd, et un max. de 20.4 gr/tonne. Les chromites contiennent des inclusions de laurite-erlichmanite [RuS2-OsS2], d'isoferroplatine [Pt3Fe], de prassoite [(Rh,Ir,Pt,Cu,Fe)S], et des arséniures de Rh associés à la serpentinisation. Hall est caractérisé par des chromitites anti-nodulaires remplissant des brèches dans une dunite métasomatique, qui elle remplace des pyroxénites et péridotites. Nous croyons que ces chromitites tardives se sont formées à partir d'un magma boninitique qui migra au travers de la croûte le long d'une faille ou d'un cisaillement. L'enrichissement en eau et Cl du magma aurait retardé la saturation en chromite, remplacé le pyroxène par l'olivine dans l'auréole métasomatique, et transporté les ÉGP. Une décompression subite reliée au mouvement le long de la faille aurait causé la bréchification et la déposition de chromitite enrichie en ÉGP. Star Chrome est constitué de veines de chromitite (1-20 cm, max.20.7 gr/tonne Pt+Pd) coupant des webstérites. Nous envisageons un modèle similaire à Hall, où les magmas enrichis en ÉGP-Cl se sont concentrés dans une coupole à l'interface dunite/pyroxénite, possiblement à la faveur d'une faille intra-océanique. Les donnés préliminaires suggèrent que les dykes dunitiques associés sont enrichis en terres-rares légères, ce qui pourrait constituer un métallotecte. Les chromitites de Star Chrome contiennent des alliages complexes de Cu-Ni-Fe-As-S-Pt-Pd, et de la potarite [PdHg] située dans des fractures et veines tardives, impliquant une remobilisation des ÉGP par des fluides post-cristallisation. Cette minéralisation pourrait être propice à l'exploration par géochimie de sol. Notre cartographie a révélé une série de failles normales syn-magmatiques, délimitant des blocs basculés dans la croûte supérieure, et ayant guidé des intrusion mafiques-ultramafiques. La reconnaissance de structures extensionnelles syn-océaniques permet d'expliquer la dissection grossière du massif, et la juxtaposition de laves contre des faciès mantelliques. Dans un contexte métallogénique, la découverte de ces failles est importante puisqu'elles permettront d'extrapoler la position de minéralisations stratiformes, si jamais celles-ci seraient découvertes au sein des pyroxénites et gabbros; et que les failles pourraient représenter des structures favorables à la localisation de fluides minéralisateurs (e.g. Star-Chrome et Hall). La découverte de lambeaux d'un essaim filonien indique que la genèse du COTM est reliée à des processus d'extension syn-magmatique intra-océaniques (seafloor-spreading). L'absence commune du complèxe filonien est attribuée à des processus érosionnels. Nous avons identifié deux surfaces érosionnelles. Une première marque la base des laves boninitiques et correspond parfois au développement de brèches hypabyssales. Une deuxième est synchrone à l'exhumation syn-obduction, et représente la base de la brèche de Coleraine/St.-Daniel. L'incision à la base de ces surfaces érosionnelles atteint localement la Zone Dunitique, ce qui suggère que des dépôts de chromite platinifères de type paléo-placer pourraient exister au sommet du COTM. Les travaux de reconnaissance suggèrent que le COA et COTM représentent un même segment de croûte océanique. Si vrai, ceci implique que le COA est une cible tout aussi favorable pour l'exploration que le COTM.