Chronique

Le retour du balancier à l’UQAC

PARTAGE - Spécialiste de renommée internationale, Mustapha Fahmi a choisi l'Université du Québec à Chicoutimi pour enseigner et partager sa passion de Shakespeare. (Photo Sylvain Dufour)
CHICOUTIMI (CJG) – Si les cerveaux quittent massivement et malheureusement la région, cette dernière en attire toutefois une quantité d’une qualité très appréciable.

Depuis trois ans, l’Université du Québec à Chicoutimi a fait entrer dans ses
rangs plus d’une trentaine de professeurs réguliers, en plus des professeurs
invités et substituts. Parmi eux, Mustapha Fahmi, professeur au département
des arts et lettres et spécialiste international de Shakespeare.
Pour ce Marocain d’origine, qui a étudié au Maroc et en Angleterre avant de
venir faire sa maîtrise et son doctorat en études anglaises avec une
spécialisation sur Shakespeare à Montréal, il est certain que la seule et
unique chose qui va permettre à la région d’attirer des gens va être le
travail. «Les jeunes quittent la région pour travailler ailleurs et ici, des
postes importants s’ouvrent. Ça va attirer beaucoup d’étrangers à venir
s’établir ici», estime-t-il.
En contrepartie, cela implique une modification dans l’attitude de la
société. «Il faut que la société se prépare à voir plus d’étrangers et à
accepter la différence. Les populations, ici comme ailleurs, ne sont pas
éduquées à faire face à ce changement», croit Mustapha Fahmi.
Selon lui, les gens doivent être plus ouverts certes, mais cela, dans le vrai
sens de l’ouverture. «Il faut accepter que l’autre ait un regard sur moi
différent de celui que je possède sur moi-même. C’est d’accepter le regard
de l’autre sur moi», résume le professeur qui considère aussi qu’il faut
accepter qu’il y ait d’autres perspectives, tout aussi correctes que celles
auxquelles nous sommes habitués. Et selon lui, la région est prête à faire
cette ouverture.
En s’ouvrant aux autres cultures, une région comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean
peut en retirer bien des avantages. «Avoir plus qu’une culture, plus qu’une
langue, ça multiplie les perspectives. Et avoir des perspectives, c’est
avoir différentes vérités».

Irréalisme

Si cela lui fait mal au coeur de voir des étudiants brillants quitter la
région pour aller faire fonctionner leurs méninges dans d’autres provinces
ou pays, le professeur blâme le manque d’irréalisme des dirigeants. «On peut
et on doit rêver. Ce qui me déçoit, c’est que je n’ai jamais entendu
personne avoir un rêve pour la région. On a des plans, mais sans les rêves,
sans la folie, on ne peut rien faire».
Évidemment, il ne faut pas agir de façon irraisonnée, mais faire preuve d’un
petit manque d’imprudence peut être très bénéfique. «Si je ferme ma main,
je ne perds rien, mais je n’ajoute rien non plus. En m’ouvrant un peu, je
risque de perdre, mais j’ai aussi des chances de gagner quelque chose»,
image Mustapha Fahmi qui considère que d’avoir des rêves est le travail des
politiciens et députés.