Chronique

Fichier Balsac – Une équipe travaille dans l’ombre

Mario Bourque, coordonnateur du projet et responsable du développement de la banque et Michelle Jomphe, responsable du service à la recherche. (Photo : Jeannot Lévesque)
CHICOUTIMI (FSTG) – « La fonction première du fichier Balsac, est d’offrir, aux chercheurs, un corpus de données sur lequel ils vont pouvoir travailler. C’est l’objectif derrière le projet ».

Derrière cet objectif et les multiples travaux et nombreuses recherches menés depuis la création du fichier, il y a plus de 30 ans, se cache un groupe de spécialistes oeuvrant dans l’ombre. Sans eux, l’ambitieux projet Balsac ne serait qu’une coquille vide, une masse de données inutilisables. Par leur travail, Mario Bourque et Michelle Jomphe, respectivement responsable de la coordination de la constitution du fichier et responsable du service aux chercheurs, permettent l’exploitation des informations recueillies dans le cadre du projet.

« Mon rôle, c’est de constituer le fichier, de le construire, à partir des données contenues dans les actes d’état civil pour la population de la région et des actes de mariage pour le reste du Québec, et ce de 1800 jusqu’à nos jours. L’équipe que je coordonne doit assurer la saisie de ces informations, puis veiller à en faire le jumelage afin de les rendre utilisables pour les travaux des chercheurs », souligne Mario Bourque.

Une tâche évidemment colossale et compliquée : il y a ainsi 4,1 millions d’actes au Québec devant être saisis dans la banque informatisée d’abord, puis analysés. Ce qui fait en sorte que l’équipe derrière le succès du projet Balsac ressemble à une véritable PME : une trentaine de travailleurs, de vastes locaux situés à l’Institut scientifique du Saguenay–Lac-Saint-Jean et un budget de fonctionnement qui dépasse, bon an mal an, les trois quarts de million de dollars.

« La saisie des données est présentement complétée jusqu’à pour la période de 1940 (pour le reste du Québec). Le jumelage et le recoupement de celles-ci sont terminés jusqu’à pour 1895. Nous espérons que ce travail de jumelage sera rendu en 1940 d’ici l’an prochain », indique Mario Bourque.

Grâce à l’élaboration d’outils informatiques aussi unique que le projet Balsac lui-même, le traitement des informations se fait rondement. Toutefois, l’expertise humaine est encore souvent requise afin de départager certains citoyens portant les mêmes noms, ce qui peut parfois s’avérer une lourde tâche. Et comme les données de Balsac servent souvent à des fins de recherche très pointue, l’erreur n’est pas permise.

« Nous avons une marge d’erreur très faible, soit de 0,03 % surtout parce que nous travaillons avec des informations de grande qualité et que les actes sont très riches », précise M. Bourque.

Le travail de ce dernier risque toutefois de s’alourdir considérablement au cours des prochaines années. En effet, les responsables de Balsac, qui souhaitent faire remonter le fichier jusqu’aux années 2000, entrent maintenant dans la recherche et la saisie de données des années 40 à aujourd’hui. En raison des bouleversements subis par la société québécoise, les façons de trouver cette information devront être adaptées.

« Entre les années 40 et 70, le nombre de mariage s’est multiplié. Mais à partir des années 70, une autre difficulté s’ajoute, il y a de plus en plus d’unions de fait. Il va nous falloir adapter nos méthodes », mentionne Mario Bourque.

Les demandes viennent de partout

CHICOUTIMI (FSTG) – Pendant que l’équipe de Mario Bourque construit le fichier, celle de Michelle Jomphe le met au service des chercheurs… du monde entier!

« Mon travail consiste à offrir les ressources du fichier. Je sers de contact entre Balsac et les chercheurs intéressés pas son contenu », explique-t-elle. Ce qui ne s’avère pas une mince tâche dans les faits. Une quarantaine de projets universitaires impliquant autant de chercheurs et d’étudiants inscrits à la maîtrise ou au doctorat utilisent actuellement les informations contenues dans Balsac.

« Je cherche d’abord à comprendre ce que les utilisateurs veulent faire et je les informe des limites du fichier. Ensuite, nous préparons les données » illustre Michelle Jomphe.

Comme le projet Balsac représente une mine d’informations unique au monde, les demandent proviennent de partout, des Pays-Bas jusqu’aux universités américaines. Elles concernent également tous les champs d’expertises, de la démographie à l’histoire, en passant par l’épidémiologie génétique.

Si des chercheurs de partout dans le monde s’intéressent au fichier Balsac, c’est qu’il est le seul du genre à permettre d’étudier les phénomènes de population sur une aussi longue période de temps, et ce en raison des caractéristiques historiques bien particulières du Québec et des registres bien documentés de l’Église catholique.

Modèle éthique

En mettant au point leur fichier, les responsables du projet Balsac on aussi dû mettre au point des modèles d’éthique scientifique. À une époque où la protection des informations privées est presque devenue une obsession, c’était une condition formelle à la poursuite de la réalisation du fichier.

« Il y a toute une procédure et tout un code d’éthique que les utilisateurs de nos données doivent respecter. Nous avons mis en place des contrats éthiques et des modèles qui protègent les données. L’encadrement est très sévère de ce côté », affirme Michelle Jomphe.

« De toute façon, la plupart des chercheurs n’ont pas besoin de noms et travaillent avec des numéros », précise-t-elle.

Autre conséquence donc du projet Balsac, les modèles d’éthique scientifique développés en même temps que le fichier servent désormais de référence du genre …