Finissante au doctorat en ingénierie, Claire Charpentier a effectué sa soutenance de thèse le 12 juin 2025. Sous la direction de recherche de Gelareh Momen (UQAC) et la codirection de Jean-Denis Brassard (UQAC) et de Mario Marchetti (Université Gustave Eiffel), sa thèse a pour titre « Outils de détermination des critères de performance des produits antigivre et dégivrants pour piste d’aéroport afin de définir les taux d’épandage optimaux ».
Sous la présidence de Kadiata Ba (UQAC), le jury d’évaluation était composé de Derek Harvey (UQAC) et de Malal Kane (Université Gustave Eiffel).
Résumé de la thèse
Les hivers canadiens donnent lieu à de nombreuses intempéries liées au froid. En effet, dans cette région du monde, les températures, parfois extrêmes, conduisent à des précipitations récurrentes telles que la neige, la bruine ou la pluie verglaçante, etc. Cette contamination des surfaces est une problématique importante pour les aéroports canadiens qui doivent maintenir une qualité de piste avec une faible glissance pour que les avions puissent circuler sur la piste en toute sécurité. Afin de maintenir un état de surface approprié pour la piste, ces derniers utilisent des outils mécaniques (grattes, balais, fraiseuse, etc.) mais aussi des produits chimiques hivernaux qui assurent la fusion de la contamination accumulée ou qui protègent la piste avant une précipitation.
Toutefois, il n’existe aucune norme guidant précisément les aéroports dans le dégivrage et l’antigivrage des pistes. En effet, Transport Canada possède et partage des normes pour aider aux opérations mais aucun guide précis comme pour le dégivrage et l’antigivrage des aéronefs. Un avion bien dégivré et protégé est crucial mais, s’il décolle ou qu’il atterrit sur une piste contaminée par de la neige ou de la glace, cela devient dangereux. En effet, des accidents se produisent encore. De plus, les produits chimiques utilisés ont un coût mais surtout un impact écologique. Donc juste en épandre énormément dans le doute de se dire « trop c’est mieux que pas assez » reste une solution néfaste à long terme.
Les normes de la SAE donnent le point de congélation comme actuel et seul critère évalué d’échec hivernal. Il existe tout de même trois essais normés de performance en dégivrage, utilisés à des fins de comparaison entre les produits, leurs résultats restants toutefois informationnels. De plus, il n’existe aucune donnée en antigivrage ni sur le taux d’épandage.
Cette thèse, effectuée avec la collaboration des aéroports de Montréal, vise donc à développer une méthodologie en laboratoire pour évaluer la performance des produits chimique de dégivrage et d’antigivrage utilisés pour les pistes d’aéroport. Cette méthodologie intègre les connaissances issues de la littérature, des observations sur le terrain et des expérimentations.
Un modèle dynamique a été élaboré dans la première phase du projet afin d’approfondir les connaissances sur l’interaction entre le produit chimique et la glace lors de la pénétration de cette dernière. Nous avons observé que le mode dominant de transfert de chaleur est la convection laminaire naturelle. Le modèle prédit une longueur de fusion uniforme pour l’ensemble de la section du tube. Ainsi, cette modélisation simplifiée de la pénétration de la glace à l’aide de l’AS6211 prédit de manière acceptable une vitesse de pénétration de la glace (mm/min), confirmée par les résultats expérimentaux.
La seconde phase du projet s’est focalisée sur l’interaction physico-chimique entre de la glace et un produit chimique solide grâce à l’analyse couplée par spectroscopie Raman et thermographie infrarouge. Grâce à ces techniques d’analyse, il est possible de déterminer l’évolution de la concentration du produit chimique en solution et la température radiative de surface tout au long de l’action de ce produit chimique sur le contaminant solide. Les phases initiales du contact entre le celui-ci et la glace impliquent des réactions de fusion exothermiques qui génèrent de la saumure, suivies d’un échange de chaleur avec la glace environnante pour encourager la fonte. La phase finale est la fonte complète du contaminant solide, qui ne laisse que de la saumure avec un échange de chaleur réduit à la surface. Par la quantification de ces changements thermiques et chimiques, nous comprenons mieux la fonte de la glace liée aux produit chimique, et une évaluation plus solide peut être fournie aux aéroports les utilisant.
Enfin, la dernière phase du projet s’est intéressée à l’activation mécanique des produits chimiques. L’activation mécanique joue un rôle essentiel dans l’efficacité du produit de dégivrage des pistes en tant qu’agent antigivrant. Par exemple, si une saleuse assure une activation mécanique par broyage du produit en roulant dessus, cela peut permettre aux aéroports d’éviter d’épandre à nouveau du produit et de réduire le risque de saturation des pistes, ce qui permet d’économiser de l’argent et de prolonger la durée d’action du produit. C’est pourquoi un Simulateur de Trafic Aéroportuaire (STA) a été développé afin de reproduire en laboratoire les conditions réelles d’exploitation hivernale des pistes d’aéroport et de leur environnement. Le temps d’efficacité du produit augmente au fur et à mesure que la température croît et que l’intensité des précipitations diminue. Cette relation souligne l’importance de le prise compte des conditions météorologiques pour déterminer la stratégie d’application optimale du produit. En outre, le broyage par le STA d’un produit a démontré qu’une activation mécanique plus fréquente améliore de manière significative l’efficacité du produit en tant qu’agent antigivre. Les résultats obtenus dans le cadre de ce projet constituent la base à l’élaboration d’un cadre analytique plus large, grâce à la méthodologie robuste élaborée, qui peut être étendue à d’autres conditions météorologiques.
Grâce aux outils de caractérisation physique et chimique, il est possible de déterminer la concentration en produits et la température de surface du fluide contaminant présent sur les pistes, tandis que le modèle thermodynamique élaboré dans la première phase du projet permet d’évaluer leur performance curative en présence de contaminants divers (glace, neige, slush, etc.). Grâce à ce travail, les opérations hivernales gagneront en efficacité dans de multiples aspects comme la sécurité, le coût mais aussi l’impact environnemental.
Félicitations à Claire Charpentier pour la soutenance de sa thèse de doctorat!



