Commentaires

L’Université québécoise du futur : tendances, enjeux, pistes d’action et recommandations

 

Commentaire générale

La lecture de ce rapport m’a enthousiasmé quant aux perspectives d’avenir de l’université québécoise. Évidemment, certains diront que la plupart des solutions à nos problèmes sont déjà connues et que, en ce sens, la contribution de ce rapport est modeste. Pour ma part, j’y ai vu une invitation à rêver, à imaginer ce que nous souhaitons pour les générations à venir… Et je me suis prêté au jeu avec une facilité déconcertante. Ainsi, à mon humble avis, l’université du futur est contributive d’une société apprenante dans laquelle ses citoyens se forment et se reforment sans cesse. C’est aussi simple que ça !

 

Ainsi, dans ce commentaire, je souligne certaines idées que je trouve intéressantes et je ne me suis pas gêné pour en partager de nouvelles. Certaines sont réalistes et réalisables, alors que d’autres relèvent sans aucun doute d’un idéal et d’une conception tout à fait personnelle de l’université du futur. Elles demeureront donc dans le monde de ma fantaisie. Il s ‘agit aussi parfois d’idées brutes, pas toujours raffinées, qui mériteraient sans doute d’être passées au papier-sablé… Ainsi, j’espère que, à la différence de certaines expériences passées, personne ne viendra donc me reprocher mes idées dans 5 ans…

Le rapport formule 10 recommandations pour l’université du futur. Celles-ci sont sous-tendues par l’énoncé de trois enjeux (collaborer tous azimuts, captiver pour réussir la formation, orchestrer savoir et société) et sont accompagnées de pistes d’action. Je présente d’abord un condensé de ce que je considère comme le cœur des réflexions qu’a suscité la lecture de ce rapport, puis je commente brièvement chacune des recommandations ;

  • L’impérativité de reconnaître l’institution universitaire comme moteur essentiel du progrès de la société québécoise.
  • L’importance d’assurer la pérennité du financement afin de ne plus être à la merci du clientélisme et de pouvoir jouer plus complètement son rôle social.
  • L’importance que l’université soit présente dans sa communauté tant en ce qui concerne le transfert de connaissances que de l’implication communautaire et également dans l’écoute et l’ouverture à de nouveaux besoins et de nouvelles collaborations, par exemple grâce à la création d’un espace de collaboration citoyenne.
  • L’importance d’avoir beaucoup de souplesse dans la formation, ce qui implique de poursuivre le développement de l’enseignement en modalité virtuelle de façon coordonnée et cohérente.
  • L’importance de poursuivre et d’accélérer le développement de la formation continue tant dans les programmes crédités que dans les programmes non-crédités.
  • L’importance de la « reconnaissance des acquis (RAC) expérientiels » dans le cheminement des étudiants qui sont devenus des apprenants à vie.
  • La pertinence de développer un profil de compétences transversales pour les étudiants de tous les cycles et le plus tôt possible dans le cursus académique
  • La pertinence de développer des programmes qui permettent un meilleur arrimage avec leur réalité et qui leur permet une meilleure intégration des savoirs, par exemple l’alternance études-travail.
  • L’importance de l’arrimage interordres, en favorisant notamment les passerelles entre les programmes du CEGEP et ceux de l’université, mais également développant de nouvelles formes de collaboration entre ces milieux et leurs professeurs.
  • Le développement de formation de cycles supérieures éclatées, à titre d’exemple :
    • Introduire des cours de pédagogie universitaire dans les programmes de cycles supérieurs puisqu’il s’agit de nos futurs professeurs et chargés de cours.
    • Mieux développer l’esprit critique des étudiants de cycles supérieurs afin qu’ils soient en mesure de réinvestir les connaissances et les compétences acquises de façon très pointue dans les différents enjeux sociaux.
    • Favoriser l’éclatement des mémoires, essais et thèses, par exemple en encourageant plusieurs étudiants de disciplines différentes à travailler en interdisciplinarité autour d’un même objet ;

En terminant et avant de commenter plus en détails chacune des recommandations, je formule un souhait, celui que les recommandations ne demeurent pas de grands principes qui s’articulent à des niveaux importants d’abstractions, mais qu’elles se traduisent par des actions concrètes au sein des universités.

 

Commentaire à propos des recommandations

Recommandation 1 : Financement

Je suis complètement en accord avec cette recommandation.

D’une part, la formule de financement doit être révisée afin de permettre aux universités de survivre au clientélisme. L’adoption des codes CAFF (classification académique aux fins de financement) a permis une mise à jour plus que nécessaire dans les activités et les familles de financement, mais elle n’a pas résolu le problème du financement, seulement et partiellement celui des coûts moyens.

Le rapport rappelle à juste titre que le financement des universités ne doit pas se faire uniquement en fonction du nombre d’étudiants inscrits à l’université. La proposition de la diversification des variables prises en compte pour déterminer le financement des établissements est très intéressante. À cet effet, une possibilité à explorer réside dans le fait qu’une partie du financement pourrait être attachée aux efforts que fait l’université à se lier à sa communauté. Un peu à la façon des FODAR dans le Réseau de l’UQ, une partie du financement pourrait être donnée en fonction des initiatives des universités pour se lier à sa communauté.

Par ailleurs, la diminution de la lourdeur de la reddition de compte au profit d’un plus grand suivi réel permettrait sans doute de libérer des ressources pour les investir dans la mission fondamentale de l’université.

 

Recommandation 2 : Composition représentative des corps professoraux

Je suis en accord avec cette recommandation.

La mise sur pied d’un forum de bonnes pratiques ne peut que contribuer à l’atteinte de l’objectif énoncé.

Par ailleurs, il est ici possible de faire un lien avec les commentaires réalisés pour les recommandations 1 (financement en lien avec l’implication dans la communauté) et 5 (initier des projets de valorisation de la carrière professorale). En effet, l’université peut et doit jouer un rôle dans la valorisation de la carrière « professorale » au sein de sa communauté et des autres ordres d’enseignements.

 

Recommandation 3 : Reconnaissance de l’institution universitaire

J’appuie sans réserve et avec grand enthousiasme cette recommandation !

Par ailleurs et afin d’accroitre la reconnaissance qui lui est due, l’université peut faire un pas de plus par le biais d’un effort de transparence accrue. À titre d’exemple, les instances officielles des universités (sous-commissions, commissions, conseil d’administration) pourraient migrer vers des modes de diffusion virtuelle en temps réel afin de permettre à tout un chacun d’assister et de contribuer aux échanges.

 

Recommandation 4 : différentes dimensions de l’activité universitaire

Il s’agit d’une excellente idée !

Par ailleurs, l’organisme chargé de la gestion de ces données devrait être indépendant du système universitaire québécois. De plus, il devrait comporter une interface facile d’utilisation pour l’ensemble des citoyens. Finalement, il me semble que la création d’un groupe de travail technique proposé devrait inclure dès le départ des utilisateurs potentiels de ces données.

 

Recommandation 5 : réussite des collaborations et des synergies interordres

Je suis en accord avec le soutien et l’animation d’un mécanisme permanent qui associe les ordres collégiales et universitaires.

Toutefois, je m’inspire ici du premier enjeu (collaborer tous azimuts) et me permets d’avancer quelques idées concrètes.

Pourquoi ne pas permettre aux professeurs d’intervenir aux différents ordres d’enseignement au besoin ? À cet effet, il est intéressant d’imaginer un professeur d’université intervenir dans certaines portions de matières aux autres ordres d’enseignement, tout comme il est intéressant d’imaginer un enseignant du secondaire aller partager ses connaissances aux ordres d’enseignement supérieurs. De plus, il y a également là un outil de valorisation de la profession enseignante. Évidemment, j’imagine la complexité de la mise en œuvre de cette idée.

Pourquoi ne pas permettre aux étudiant d’acquérir des crédits universitaires dès le secondaire, dans la réalisation de projets parascolaires par exemple ? Cela permettrait sans aucun doute de valoriser les études supérieurs et contribuerait à l’accroissement de la fréquentation universitaire (recommandation 7).

Valoriser une plus grande implication de l’université dans l’ensemble du réseau de l’éducation. Dans le sport-étudiant par exemple… les universités regorgent de spécialistes qui pourraient contribuer à des problématiques vécues dans le réseau. Cette implication pourrait être financée à même la recommandation 1, c’est-à-dire dans les sommes versées aux universités conditionnellement à leur implication dans la communauté.

Finalement et également en lien avec la recommandation 7, la création d’un portfolio des compétences permettrait aux étudiants de constater leur progrès et leur développement citoyen du collégial aux différents cycles universitaires, en plus de fournir une certaine cohérence à leur formation.

 

Recommandation 6 : Synergies des collaborations et des synergies à l’intérieur de l’ordre universitaire

Je m’inspire également du premier enjeu (collaborer tous azimuts) afin d’énoncer ou de supporter quelques idées :

L’adoption d’un référentiel de compétences transférables et la création d’un portfolio conséquent permettrait aux différents services et secteurs universitaires d’adopter un langage commun dans leur investissement pour la réussite étudiante.

Favoriser les programmes de type conjoints comme il y en a dans le réseau de l’UQ. En effet, ce type de programmes permet de mutualiser les forces professorales et les ressources des universités afin d’offrir des programmes de meilleure qualité avec une plus grande diversité de points de vue.

De plus, afin de valoriser l’interdisciplinarité et la diversité de la carrière professorale, pourquoi ne pas encourager la création de postes de type « joint appointment » ?

En lien avec la recommandation 9, pourquoi ne pas viser la création à l’intérieur même des universités (ou mieux les supporter si ces structures existent déjà) d’espaces pour débattre et discuter des enjeux sociaux et académiques (par exemple la liberté académique et les grandes questions pédagogiques telle que les formules d’enseignement et la taille des groupes-cours) ? Ces lieux auraient notamment pour objectif de créer des possibilités de collaboration et de générer des idées nouvelles.

Finalement, je mets deux bémols à cette recommandation :

  1. Il ne faudrait pas que la recommandation 6.1 soit interprétée par les administrateurs des universités comme un justificatif pour agrandir la taille des groupes-cours.
  2. Il est à souhaiter que la recommandation 6.3.1 n’implique pas de nouvelles mesures de succès, de comparatifs et donc de performance.

 

Recommandation 7 : Accroissement de la fréquentation universitaire aux trois cycles

 J’appuie fortement cette recommandation !

 La création d’un portfolio de compétences me semble une excellente idée ! Celui-ci pourrait permettre aux étudiants de constater réellement leur développement et ce dernier pourrait les accompagner tout au long de leur formation.

 La diversification de la population illustre l’importance de continuer à développer les formations de base, qualifiantes et professionnelles, mais également de développer la formation continue. En effet, la formation continue concerne les professionnels en exercices, mais également les travailleurs qui désirent se requalifier ainsi que les gens qui désirent se former par plaisir (et je pense notamment ici au troisième âge).

Dans le même esprit, les services de formation continues devraient investir dans des formations courtes (voire très courtes), de type « juste à temps ».

Dans plus, le premier enjeu (collaborer tous azimuts) invite à développer une plus grande collaboration entre les services de formation continue et les programmes de formation créditées.

 

Recommandation 8 : Accroissement de la réussite scolaire et de la diplomation aux trois cycles

Je suis tout à fait en accord avec la poursuite de la transformation des formules pédagogiques au sein des universités ! La réussite d’un programme d’études ne me semble plus consister uniquement dans l’accumulation de savoirs. En effet, il nous faut aider les étudiants à développer des compétences en lien avec ces savoirs et propres à leur milieu. À titre d’exemple, cela peut se faire par l’alternance travail-études, grâce à l’apprentissages par problèmes, en limitant la taille des groupes (ce qui permet une meilleure intégration des savoirs). De même, on ne peut qu’être en faveur de la poursuite des efforts de développement des méthodes pédagogiques virtuelles.

J’ajoute également quelques idées :

Pourquoi ne pas bonifier la reconnaissance de crédits universitaires pours des implications sociales et en lien avec le programme d’études ? Ces reconnaissances existent déjà mais elles sont peu utilisées.

La valorisation de la reconnaissance des acquis expérientiels faciliterait sans aucun doute le cheminement et la diplomation de plusieurs professionnels en exercice qui réalisent des retours aux études ou des diplômes de cycles supérieurs.

Pourquoi ne pas intégrer des cours de pédagogie universitaire dans les programmes de cycles supérieurs. Ces étudiants représentent les futurs professeurs et chargés de cours. Leur donner une formation en pédagogie augmentera sans aucun doute les chances de succès de leurs propres étudiants éventuellement.

Finalement, la formation de cycles supérieurs est censée contribuer au développement de l’esprit critique. Or, ces étudiants développent des connaissances et des compétences bien pointues, mais éprouvent parfois des difficultés à les transférer ou à les utiliser dans d’autres contextes. Une réflexion sur le développement de l’esprit critique et de leur rôle dans l’espace social pourrait être intéressante.

 

Recommandation 9 : collaboration université-société amplifiée

L’université comme chef de file, cela me semble aller de soi. J’appuie sans réserve cette recommandation.

Pour faire écho au titre du rapport, l’université du futur doit montrer l’exemple dans la transformation de ses structures, de ses méthodes, de ses choix afin de s’imposer comme chef de file dans sa communauté. En valorisant le discours, l’échange, la collégialité, en structurant ses orientations et ses décisions sur la science, l’université pourra assumer le rôle qui lui revient de plein droit. Autrement, cela lui sera difficile voire impossible.

Idées : avoir des forum citoyens afin de débattre et de provoquer des idées de recherche (c’est sûr que s’il y a du financement attaché à ça, ça va fonctionner).

En lien et à la suite de la recommandation 1, pourquoi ne pas réfléchir à l’ajout d’une portion de financement qui est conditionnel à l’implication de l’université dans son milieu ?

J’ajoute quelques idées qui abondent dans le sens de cette recommandation :

Développer des forums citoyens dans les CEGEPS, les écoles secondaires et différents milieux afin de vulgariser les connaissances et participer à des débats sur des enjeux sociaux d’actualité.

Pourquoi ne pas créer des tables de discussions ouvertes université – société. Celles-ci permettraient de lancer des initiatives de recherches collaboratives ou citoyennes, dans lesquels les citoyens pourraient y exprimer leurs besoins, provoquant ainsi des occasions de recherches, et de transfert de connaissances.

Par ailleurs, il m’apparaît important d’intensifier et d’actualiser le concept de ville-universitaire.

Tel que déjà souligné dans les idées soumises à la recommandation 6, pourquoi ne pas viser la création à l’intérieur même des universités (ou mieux les supporter si ces structures existent déjà) d’espaces pour débattre et discuter des enjeux sociaux et académiques (par exemple la liberté académique et les grandes questions pédagogiques telle que les formules d’enseignement et la taille des groupes-cours) ? Ces lieux auraient notamment pour objectif de créer des possibilités de collaboration et de générer des idées nouvelles.

 

Recommandation 10 : mécanisme permanent de liaison université-société

Je suis tout à fait en accord avec cette recommandation. Il m’apparaît important de développer un mécanisme souple et englobant de liaison entre les universités et la société civile. Je me permets toutefois de réitérer la préoccupation énoncée d’entrée de jeu à l’effet que ces recommandations ne mènent pas à la création de structures de haut niveau qui n’ont, au final, que peu d’impact sur le milieu.

À cet effet et de façon très concrète, les services de formation continue constituent déjà une interface avec le milieu. Ainsi, au lieu d’inventer quelque chose de nouveau, il pourrait être utile de construire là-dessus. Dans la même ligne de pensée, dans certaines régions, des tables existent déjà avec les partenaires économiques, sociaux et des autres ordres académiques. Il nous faut trouver le moyen d’optimiser ces mécanismes et non en inventer de nouveaux.