Jocelyn Paul a toujours eu un intérêt pour le passé. Membre de la nation huron-wendate, il a grandi en communauté, bercé par les récits des aînés. Sa passion pour l’histoire, particulièrement pour celle des peuples autochtones, a motivé son choix de programme à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC). Celui qui a diplômé du baccalauréat en histoire à l’UQAC en 1988 a été le premier officier autochtone à commander l’armée. Le lieutenant-général Paul a quitté le commandement de l’Armée canadienne en juillet 2024, marquant la fin d’une carrière de 36 ans au sein des Forces armées canadiennes.
De l’UQAC aux missions internationales
Lorsque Jocelyn Paul est arrivé au Saguenay, il venait d’avoir 18 ans; ses trois années au Saguenay sont donc le début de sa vie d’adulte. Il devient diplômé de l’UQAC l’année même où il s’enrôle dans l’armée, du côté du Régiment du Saguenay à Jonquière. Il sert ensuite dans le Régiment de Maisonneuve et étudie à la maîtrise en anthropologie à l’Université de Montréal, qu’il obtient en 1991. Cette année-là, il rejoint la Force régulière et est assigné au troisième bataillon du Royal 22e Régiment. Tout au long de sa carrière, il occupe de nombreux postes, allant de commandant de peloton à commandant du 2e Bataillon, Royal 22e Régiment, et de la Citadelle de Québec en 2008.
Il mène plusieurs missions, dont en Croatie (1993), en Afghanistan (2009) et en Israël (2014). Il a aussi commandé le Groupement tactique du 2e Bataillon en Afghanistan, où ses performances remarquables lui ont valu la Croix du service méritoire. Promu au grade de brigadier-général, il a assuré le commandement de la Force opérationnelle Jérusalem, avant de revenir au Canada en 2015 pour assumer des responsabilités de plus en plus importantes au sein de l’Armée canadienne.
À l’été 2021, il est promu lieutenant-général et prend la tête du Commandement allié des forces interarmées de Naples, en Italie, avant de revenir au pays pour être nommé commandant de l’Armée canadienne. En plus de sa carrière militaire impressionnante, il a reçu à deux reprises la Légion du mérite des États-Unis et est diplômé de prestigieuses institutions, telles que le USMC Command and Staff College. Sa carrière, ponctuée par une multitude de réalisations, a certainement marqué l’histoire de l’armée canadienne… et mondiale!
Un attachement à son alma mater
Ce qui a le plus marqué Jocelyn Paul durant ses années d’étude à l’UQAC est la qualité du corps professoral. De même, les petites classes d’une vingtaine d’étudiants contribuaient à rendre l’encadrement académique très étroit. « J’ai vraiment découvert la soif d’apprendre d’un point de vue intellectuel au cours de mon baccalauréat », lance-t-il. Deux personnes l’ont particulièrement influencé: Jean-François Moreau, qu’il considère comme son mentor intellectuel, et Pierre Jacques, décédé depuis, dont l’exigence et la rigueur intellectuelle ont grandement contribué à son développement. Tous deux lui ont appris à penser, à bien écrire et à articuler ses idées; bref, lui ont fait « devenir un adulte ».
Avoir achevé des études universitaires a permis au lieutenant-général Paul de se démarquer. À l’époque où il a joint les forces armées canadiennes, très peu d’officiers avaient des diplômes universitaires. « Les trois ans que j’ai passés à l’UQAC m’ont vraiment permis de réussir à la maîtrise [en anthropologie] et de réussir professionnellement », exprime-t-il. Il est évident que Jocelyn Paul valorise l’importance de s’éduquer. Ses études lui ont donné une compréhension essentielle des dynamiques humaines. Le lien entre ses études et le domaine militaire est concret : « […] lorsque on étudie en histoire [ou] en anthropologie […] cela nous aide à nous comprendre nous-mêmes. Cela nous aide à comprendre le passé des humains, le présent également. Lorsqu’on travaille dans le domaine de la défense, on est toujours en train d’interagir avec des humains », explique-t-il. Dans cet esprit, avant chaque déploiement opérationnel, Jocelyn Paul se faisait un devoir de se documenter sur la région concernée. Les conflits dans lesquels les militaires sont déployés ont leur fondement historique. Il est donc essentiel de s’imprégner de l’histoire, de la culture et des mœurs locales.
Malgré une carrière qui l’a mené aux quatre coins du monde, Jocelyn Paul conserve un attachement à son alma mater : l’UQAC. Il y est retourné il y a quelques années pour prendre connaissance des services offerts à la communauté étudiante autochtone. Lorsqu’il était étudiant, les services aux étudiants autochtones n’étaient qu’un simple bureau; aujourd’hui, un pavillon entier, le pavillon Nikanite, se consacre aux cultures autochtones! Constater ces progrès et être invité comme ambassadeur à la Collation des grades lui rappellent à quel point ses années dans la région ont été déterminantes.