Le développement rapide de l’intelligence artificielle générative porte autant de promesses que de défis dans de multiples domaines, incluant la vie démocratique et l’espace public.
D’une part, l’IA ouvre des perspectives qui peuvent contribuer au développement des connaissances dans différentes domaines, augmenter la capacité à tisser des liens entre ces domaines de connaissances (par exemple entre divers champs d’expertise en santé, en urbanisme, etc.), soutenir des processus de création artistiques et médiatiques et augmenter l’accessibilité de plusieurs types de contenus, notamment des contenus informationnels. D’autre part, l’IA pourrait porter les la désinformation à des degrés inédits, contribuer à la censure de la part de divers acteurs (par exemple, gouvernements, GAFAM et plateformes comme TikTok), marginaliser davantage des groupes sociaux déjà historiquement minorisés (par exemple, femmes, autochtones, personnes racisées, LGBTQIA+, personnes de la diversité capacitaire) et favoriser la diffusion de discours haineux.
Ces tensions sont centrales aux réflexions que les expert·es et scientifiques doivent considérer par rapport à l’IA en démocratie. Comme l’a souligné PEN America, la création et l’utilisation de ce qui peut sembler de l’information crédible peut éroder la confiance du public envers les médias, les institutions gouvernementales et la recherche scientifique, interpellant ainsi certains des fondements des sociétés démocratiques.
Quels sont précisément les risques et les promesses de l’IA générative pour la liberté d’expression? Suffit-il d’encadrer les conditions de la prise de parole, ou doit-on mener une réflexion plus prospective sur les systèmes d’intelligence artificielle générative? Quels sont les obstacles à l’encadrement démocratique de ces systèmes? Quelles implications peuvent avoir ces systèmes sur la subjectivité humaine, l’expression de soi et les interactions sociales? Comment l’IA générative renouvelle-t-elle les questionnements sur la nature et les limites de la liberté d’expression? Transforme-t-elle les perspectives sur les intérêts qui légitiment de restreindre la liberté d’expression? Ce sont là quelques-unes des questions auxquelles nos panélistes tâcheront de répondre.
***
***
Symposium, du 18 au 20 octobre 2023
« La liberté d’expression en question: gouvernance, rapports de pouvoir et inégalités sociales »
La défense de la liberté d’expression et les réflexions sur les manières de la justifier ont historiquement été liées à différentes controverses concernant sa nature et ses limites. On s’est donc souvent penché sur la question des modes de régulation. Mais en amont de ces derniers, et tout aussi importants, se dressent une série d’enjeux relatifs aux inégalités sociales. En effet, ces dernières limitent de manière asymétrique les capacités expressives, restreignant la possibilité pour certaines personnes de se prévaloir de ce droit fondamental. Ces questions surgissent avant d’autant plus d’acuité que l’espace public des sociétés démocratiques se transforme actuellement sous l’effet d’une série de phénomènes, dont certains ont des impacts importants sur ces dernières.
Comment s’arriment croyances et connaissances, dans la conversion démocratique, et quel rôle joue la liberté d’expression dans la visée publique de l’exercice? Quels sont les enjeux que soulève l’encadrement des capacités expressives dans les environnements numériques, et les conséquences des différentes visions de cet encadrement sur l’espace public démocratique? Où en est l’autonomie de l’art et de la littérature, aujourd’hui? Quel sens, et quelle importance les jeunes attribuent-ils à la liberté d’expression? L’institution judiciaire se présente-t-elle comme un nouvel espace public? Comment traiter la rhétorique élaborant une défense anti-pluraliste de la liberté d’expression? Que peut-on invoquer, dans l’espace public, pour justifier certaines restrictions à l’expression ou appuyer la neutralité de l’État, et comment comprendre les enjeux politiques et juridiques de la neutralité? Une conception négative de la liberté d’expression participe-t-elle en réalité à la reproduction des inégalités expressives? Voilà quelques-unes des questions qui sont au cœur de ce symposium.